vendredi 21 mars 2025

 

L’ETRANGER

Lorsqu’il est venu habiter la masure du père Vieney, il a juste dit « Je ne suis pas d’ici » depuis les gens l’appelaient « L’étranger » Il parlait très mal le français, parfois sa femme traduisait à sa place, elle était française. L’épouse faisait des ménages, leurs deux fillettes allaient à l’école puis à la garderie,  l’étranger faisait des petits travaux au noir, il n’avait pas encore l’autorisation de vivre en France.

Il était très bricoleur, savait poser le carrelage, monter un mur en ciment, connaissait la plomberie et l’été il débroussaillait les champs du village et des environs.

Le couple avait arrangé la masure, colmaté les trous et vivait assez bien. A mon tour je lui avais demandé des travaux dans le grenier, arranger une pièce supplémentaire. Il venait le matin, rentrait manger chez lui et revenait l’après-midi, le soir sa femme venait le chercher avec les enfants en voiture, il n’avait pas de permis. Les enfants attendaient dans la voiture poliment, je les ai  fait entrer et jouer dans le jardin, ils étaient polis et gentils. Un jour nous avons discuté pendant qu’il travaillait, il m’a dit qu’il était grec d’un côté et polonais de l’autre, avec une goutte de sang juif et une goutte venant d’Ukraine. Il m’avoua ne parler que le grec et le français. En Grèce il travaillait dans un cirque. Je voulais savoir pourquoi il n’était pas resté, il a ri en disant :

-        Je suis l’étranger, trop de sang mêlé dans les veines

Sa réponse me laissa perplexe, j’avais remarqué qu’il portait l’alliance à droite, comme les Grecs, je ne comprenais pas pourquoi il avait quitté son pays ? Il m’intriguait, je décidai de demander à son épouse, il arrivait qu’elle reste avec moi le temps qu’il finisse son travail. C’est ainsi qu’elle m’apprit qu’en Grèce on le considérait comme un étranger, son père venait d’Ukraine et parlait mal le grec, il aurait mieux valu le contraire. Par contre, elle ne me dit pas pourquoi il avait quitté le cirque ni son pays d’origine, il était né en Grèce.

Nous les voyons dans différents villages avoisinants travailler à l’extérieur, son épouse venir le chercher et les enfants toujours tranquilles.

L’étranger vivait dans la masure de Vianey depuis un an déjà, je le voyais en passant en voiture, lorsque j’allais faire des courses. Les enfants jouaient avec d’autres enfants, ils semblaient s’être adaptés au village.

Dans l’ensemble, les gens étaient contents de ses services, ils payaient moins chers, l’homme travaillait bien, on n’avait rien à lui reprocher.

Le travail au noir pose toujours un problème : il rend jaloux ceux qui travaillent en payant des impôts, en gagnant moins sans prendre de risques.

Je l’avais conseillé à ma voisine de droite, une vieille dame veuve, elle avait besoin de refaire son sol. L’étranger était accompagné par sa femme, elle était repartie et le soir elle l’attendait devant la porte. Parfois elle venait avant ou plus tard, selon l’heure où elle finissait ses ménages. Son travail était régulier, elle ne travaillait pas au noir. Bonne précaution, ayant deux enfants, elle ne voulait pas prendre de risques.

C’est chez ma voisine que j’ai su qu’elle l’avait rencontré au cirque, il n’exerçait plus mais ça lui manquait et dès qu’il y avait un cirque dans un village il essayait d’y aller, parfois il leur donnait un coup de main tellement il était heureux de se retrouver parmi eux. Je la questionnai, j’ai su qu’elle l’avait vu marcher sur la tête, faire des sauts un peu spéciaux… A ce moment il était venu et elle s’est tue immédiatement. Il ne dit rien, j’ai eu l’impression que cela ne lui plaisait pas de trop.

L’étranger avait fait des efforts pour comprendre et se faire comprendre, il connaissait bien l’anglais mais dans les villages français peu de gens parlent anglais, parfois un enfant traduisait.

Un jour sa fille aînée, était restée avec moi, nous avions promené mes chiens ensemble, elle me dit :

-        Mon père n’a pas de patrie

-        Il est grec pourtant

-        Je sais, mais je ne suis pas sûre qu’il se sente grec, il dit qu’il est partout « Etranger » Il aimerait que nous restions françaises, c’est trop dur !

Etonnée, je lui demandai ce qui était dur pour son père ? Elle me regarda et dit :

-        Vivre et ne pas faire partie du pays, ne pas comprendre, se sentir humilié, voir la pitié…

Je ne savais plus quoi répondre, comment changer cet état d’esprit, je ne savais pas s’il avait cette impression ou si les autres le lui faisaient sentir ?

En revenant de promenade, son père lui fit remarquer qu’il est tard, ils partirent aussitôt, sa femme conduisait. Je la sentis ennuyée, elle n’aurait pas dû laisser sa fille venir avec moi. Cette impression se confirma la fois suivante, quand je proposai à la petite de m’accompagner, sa mère refusa prétextant qu’elle allait étudier dans la voiture,  je n’insistai pas.

L’étranger vécut 18 mois tranquille, dans un village voisin. Il travaillait, parlait peu, attendait sa femme pour rentrer chez lui.

Tous étaient discrets dans l’ensemble et le peu que j’appris les autres ne le savaient pas.

Un jour, l’étranger travaillait sur un toit, il remettait les tuiles de la mère Damien, le vent les avaient fait tomber, son maçon était débordé par des dégâts plus importants, elle avait trouvé plus simple de demander à l’étranger. Cet argent permettait à l’étranger d’économiser pour arranger la masure, il comptait l’acheter et l’arranger en jolie maison pour sa famille.

Le lendemain je vis les gendarmes rôder dans le village, ils posaient plein de questions sur l’étranger, du genre

-        As-t-il travaillé chez vous, que savez-vous de lui, d’où venait-il et j’en passe…

Comme les autres je dis le strict nécessaire. J’allais voir ma voisine, elle pensait qu’il avait été dénoncé pour son travail au noir, sans doute un maçon qui avait été remplacé par lui.

Quelques jours passèrent, on ne vit plus l’étranger, la masure était fermée. Etonnée, je me renseignai auprès des voisins du village ils dirent que les gendarmes sont venus le chercher, la femme et les filles sont retournées dans la famille de l’épouse. Je demandai pourquoi on l’avait arrêté ?

-        Il était poursuivi comme trafiquant de drogue, dirent certains

-        Il avait volé les Bertrant, son prix était plus cher que prévu dit un autre

-        Il n’avait pas dit qu’il n’avait pas la carte de séjour, on ne l’aurait pas pris dit encore une personne.

L’étranger n’a plus reparu, les travaux faits ne semblaient plus aussi bien, les prix n’étaient pas intéressants puisque sa femme venait le chercher et il partait souvent avant l’heure.

Je ne me plaignais pas, tout avait été bien fait, ma voisine trouva son sol mal fait et fit venir son maçon.

Tour à fait par hasard, je tombai sur sa femme, je lui demandai comment allait son époux, elle me répondit :

-        il a quitté la France

-        Comment, et vous ?

-        Il n’avait pas la permission de vivre en France, c’est pour ça qu’il vivait à la campagne, il a été dénoncé pour avoir travaillé au noir. Les gendarmes sont venus le chercher et l’ont ramené en Grèce.

-        Et vous, vous n’avez pas pu le suivre ?

-        Non, je suis française, il m’a écrit qu’il va essayer d’avoir un visa pour venir, je n’y crois pas de trop. Pour la drogue c’est vrai mais il a payé, il est allé en prison, depuis jamais il n’y a touché. Je me demande comment ils ont pu savoir ?

Elle pleurait disant qu’elle l’avait prévenu que les gens n’aiment pas les gens d’ailleurs. Elle s’était réfugiée chez ses parents car on attaquait ses filles, disant que son père travaillait mal, qu’il était un escroc, qu’il ferait de la prison…

Maintenant je dois oublier, mes filles aussi tout en souhaitant le retrouver un jour, j’ai envoyé une lettre en Grèce, après je n’ai plus continué, s’il se cache, je ne veux plus qu’on le dénonce, surtout pas par moi.

L’étranger n’est plus revenu, l’épouse vécut chez ses parents, elle éleva seule ses enfants, il ne lui donna plus signe de vie, pourtant, un jour elle disparut à son tour...

Elena

mercredi 19 mars 2025

 

L’ECUREUIL 2012

Le matin en nous promenant nous voyons un écureuil, sont-ils nombreux ? Je n’en sais rien, souvent il traverse le chemin et se cache dans le blé ou le maïs. Il y a aussi les arbres qui bordent le chemin, l’écureuil n’a pas de mal à y monter. Jamais Arvie ne m’a tiré vers l’animal, elle n’a même pas essayé de courir derrière lui alors que mes autres chiens l’auraient fait. C’est ainsi que nous voyons passer parfois un lièvre, un faisan ou un écureuil.

Demain je retournerai sur le chemin sans faire de bruit avec l’espoir de revoir l’écureuil qui vit dans les parages. J’essayerai de le photographier, sans même le déranger.

Elena 2012



lundi 17 mars 2025

 

#lundi soleil

Mars 2025 : barques et bateaux

https://www.bernieshoot.fr/

 

https://www.facebook.com/groups/lundiSoleil/

 

#barques et bateaux ;  en Thaïlande




vendredi 14 mars 2025

 

Emile VERHAEREN (1855-1916)

Poète belge symboliste, lyrique et anarchiste, il pratique le vers libre.

Il publia « Les Flamandes » réaliste, naturaliste, consacré à son pays.

Il épouse Marthe Massin qui l’inspira pour la trilogie « Les heures claires, les heures de l’après-midi et les heures du soir »

Il écrivit des poèmes futuristes, se retrouvait dans des cercles de poètes. Il fréquentait toute la famille royale.

Il mourut accidentellement poussé vers un train qui partait.

Elena

AVEC MES SENS, AVEC MON CŒUR…

 

Avec mes sens, avec mon coeur et mon cerveau,
Avec mon être entier tendu comme un flambeau
Vers ta bonté et vers ta charité
Sans cesse inassouvies,
Je t'aime et te louange et je te remercie
D'être venue, un jour, si simplement,
Par les chemins du dévouement,
Prendre, en tes mains bienfaisantes, ma vie.

Depuis ce jour,
Je sais, oh ! quel amour
Candide et clair ainsi que la rosée 
Tombe de toi sur mon âme tranquillisée.

Je me sens tien, par tous les liens brûlants 
Qui rattachent à leur brasier les flammes ;
Toute ma chair, toute mon âme 
Monte vers toi, d'un inlassable élan ; 
Je ne cesse de longuement me souvenir
De ta ferveur profonde et de ton charme,
Si bien que, tout à coup, je sens mes yeux s'emplir,
Délicieusement, d'inoubliables larmes.

Et je m'en viens vers toi, heureux et recueilli, 
Avec le désir fier d'être à jamais celui 
Qui t'est et te sera la plus sûre des joies.
Toute notre tendresse autour de nous flamboie ;
Tout écho de mon être à ton appel répond ; 
L'heure est unique et d'extase solennisée
Et mes doigts sont tremblants, rien qu'à frôler ton front, 4




mercredi 12 mars 2025

 

LE PETIT PHILOSOPHE de poche

Il me fut offert par ma mère pour mes 15 ans et j’aimais en lire des extraits, je ne m’en lassais pas. Il me suivit dans tous mes déménagements.

Il y a peu de temps je me demandai où se trouvait mon »petit philosophe de poche » j’ignore le nom de l’auteur et je ne me souvenais plus si je l’avais classé par ordre alphabétique ou grosseur du livre. Il faut dire que vu le nombre de mes livres j’ai fini par entasser selon la grandeur du livre car mes étagères ne sont pas toutes de la même hauteur.

C’est ainsi que j’ai commencé à ranger ma bibliothèque qui en avait bien besoin, j’en profitai pour mettre mes livres de poche dans un carton tout en cherchant le petit philosophe mais je ne le trouvais pas.

Cette fois je triai tout par ordre alphabétique en mettant de côté les livres trop abîmés ou trop grands…

A la fin de la journée j’avais des livres étalés tout au long de ma table et je décidais de donner certains livres à une maison de retraite. Une fois tout rangé, je me mis à trier un par un les livres de poches qui allaient dans les cartons et toujours pas mon petit philosophe. Je rangeai tout sur mes étagères et là je le vis à sa couleur marron, il était coincé à terre et pour le ravoir il fallait démonter les étagères. Il n’en était pas question, je me consolai en sachant qu’il n’était pas perdu et qu’un jour je le retrouverai peut être…

Elena