Il était PDG dans les tissus, tout le
monde le connaissait sous le nom de « Simon » avec ou sans monsieur.
Je l’ai rencontré dans un cabaret russe où chantaient des amis d’enfance. Ivan
à qui j’avais expliqué ma situation financière au bord du gouffre décida de me
le présenter. Il s’assit en face de moi et mon amie, je n’aimais pas aller
seule au cabaret. Nous avions une trentaine d’années chacune et lui, le double.
Il nous apprit qu’il était polonais mais parlait un russe impeccable. A sa troisième vodka il
me parla des grands écrivains, sa culture était colossale et je le trouvai
vraiment intéressant. Seulement je buvais de l’eau et lui de la vodka, au bout
d’un moment il ne savait plus trop ce qu’il disait.
-
Je vous invite au cabaret « L’Etoile de
Moscou « dit –il. Je savais que c’était le meilleur cabaret de Paris
et qu’il coûtait horriblement cher, je regardai Ivan,
il opina et me dit discrètement « il
peut, il est très riche et si ce n’est pas nous ce seront d’autres »
J’acceptai sans remords ainsi que mon amie. Entre temps il invita d’autres
personnes à venir avec nous, il nous proposait de dîner ou prendre un pot
là-bas.
Ivan
et ses amis jouaient bien de la guitare mais ils chantaient vraiment mal, ils
ne connaissaient pas bien la langue russe. Je pensai aussi que je n’aurai pas
d’autres occasions d’aller à la « L’Etoile de Moscou » et j’étais contente
de l’occasion qui s’offrait à moi.
Nous
sommes rentrés une dizaine, les serveurs serviles se précipitèrent vers lui
faisant du « M. Simon » lui
trouvant une grande table devant pour bien voir le spectacle, il était
presque à sa fin.
Des
jeunes chanteuses et danseuses sont venues embrasser Simon, lui parler comme à
un enfant gâté, il roucoulait au milieu de son fan club. Il n’était plus le
même mais un homme qui invitait tout le monde généreusement, payait sans
rechigner. J’ai compté qu’il avait
dépensé une somme folle dans la soirée. Ivan me dit à l’oreille
« Il le fait presque tous les soirs, ne t’en fait pas il est
millionnaire » J’avoue que je ne m’en faisais pas du tout.
J’avais
commandé un jus de fruit à son compte et j’admirai le spectacle, les pitreries
d’un vieil homme soûl ne m’amusaient nullement.
A
cette époque j’étais au chômage et j’en profitai pour lui glisser un mot de mon
état précaire. Il me rassura aussitôt :
-
Viens me voir demain au café en face du métro La Bastille à 18 heures, j’ai
quelque chose pour toi, ma secrétaire vient de prendre sa retraite, cela t’intéresse ?
-
Oui, merci beaucoup ! Seule avec une fille pré adolescente j’aurai accepté
n’importe quoi, il me tenait, il me fallait absolument cet emploi.
Le
lendemain j’attendais au café de la Bastille depuis deux heures mais à 20
heures 30 je partis et allais voir si je trouvais le vieux Simon au cabaret où
je l’avais rencontré. Il y était avec une nombreuse cour. Me voyant il me fit
signe de venir, je répondis :
-
Je n’aime pas les lapins ! Et j’allai m’asseoir un
peu plus loin froissée qu’il m’ait oublié.
Ivan vint me dire qu’il était
beaucoup sollicité et qu’il ne fallait pas lui en vouloir, la prochaine fois il
m’aidera. Il me proposa même de lui parler de mon cas presque désespéré avec ma
gamine de douze ans passé.
Trente minutes plus tard Simon me
fit signe et je rampai vers lui oubliant mon orgueil. Il me promit de venir au
même café le lendemain à la même heure, il serait plus libre et la place était
toujours disponible pour moi.
Le lendemain, j’attendis encore
plus de deux heures, je n’avais que son téléphone à domicile et il ne fallait
pas appeler à cause de sa femme jalouse. Après avoir consommé deux menthes à
l’eau je partis le cœur lourd, il me tenait, je n’avais aucune perspective et
je devais trouvais trouver un travail d’urgence.
Au bout de cinq jours de
rendez-vous remis, de dîners au cabaret
gratuits, car le vieux Simon m’invitait à manger ainsi que d’autres : des
jeunes couples et surtout des courtisans ; je n’arrivais pas à refuser
tellement j’étais juste financièrement, je décidai de retourner chez ma mère où
j’avais laissé ma fille et de trouver un poste de caissière ou de femme de
ménage, bref ce qui se présenterait dans les journaux.
A ce moment Simon me dit :
-
Ne t’inquiète pas tu l’auras ta place, attends un
peu !
Je ne répondis pas, j’allais voir
Ivan qui m’expliqua :
-
Laisse tomber, il te fait tourner en rond, il est si
sollicité que ça l’amuse.
Je le remerciai et je rentrai
chez moi.
Le lendemain matin le vieux Simon
me téléphona comme il faisait souvent :
-
Bonjour, je t’attends à la Bastille au café face au
métro, ce soir je n’ai rien je serai là.
-
Bien sûr, j’y serai. Ce furent les derniers mots que je
lui dis. J’achetai le journal et je trouvai plusieurs places de secrétaires, le
problème était que je n’avais aucune formation pour la place, je l’avais juste
exercé dans le cadre d’une association contre la faim.
La chance voulut qu’un chef de
personnel accepte de me prendre dans son entreprise et je retrouvai un emploi.
C’est là que je remarquai à quel point le vieux Simon m’avait rongé, et tenu en
son pouvoir. J’étais devenue toute maigre, les yeux cernés et nerveuse. Je
laissai ma fille quelques mois chez ma mère le temps d’avoir un contrat fixe.
Le temps s’écoula et je repris des forces goût à la vie, ma fille vint vivre
avec moi. Malgré tout je n’oubliai jamais le vieux Simon et quand Ivan me dit
au téléphone :
-
Tu te souviens de Simon ?
-
Oui, bien sûr,
-
Il est mort, il buvait beaucoup de trop et avait un
cancer de la gorge.
Une parcelle de ma vie se referma
avec cette nouvelle et j’en fus presque soulagée.
Elena 2013
Une parcelle de vie qui nourrit tes souvenirs
RépondreSupprimerNon je n'ai pas laissé tomber mon blog , bien au contraire j'y publie quotidiennement ...
L'adresse de ce dernier http://lapoesiedetimilo.blog50.com/
Douce journée Eléna
Bisous
timilo
merci pour cette parcelle de vie, une histoire un peu triste d'un homme qui brulait ses dernières cartouches, heureusement ton amie a réagi...bonne fin de semaine, grosses bises
RépondreSupprimerCela me fait penser au roman d’Émile Zola "L'Argent" dans la série " Les Rougon-Macquart".
RépondreSupprimerbelle tranche de vie ... juste ..." je rampai vers lui ".....ça ,dans la phrase, me rend perplexe ...rampai .....
RépondreSupprimerla tempête est passée pas de dégats , juste de hautes vagues à la mer mais ici en ville j'ai deja connu pire , le vent ne siffle plus du tout dans la cheminée et le ciel est superbement bleu!
bisous et belle journée
une belle histoire vécue, Elena;
RépondreSupprimerbelle journée;
Bonjour Elena,
RépondreSupprimerCe sont de belles rencontres Elena, mais cette amie dont tu relates la rencontre avec cet homme est pénible, l'argent et la maladie ne permettent pas tout, fausses promesses auxquelles elle se rattachait au point de ramper vers lui ... comme quoi quand tu te retrouves dans la misère tu peux être affaibli au point de te laisser humilier.
Très belle journée à toi.
Bisous.
Prima
J'ai repris sur mon Overblog-Kiwi, un ancien billet ... inspirée par une publication d'un ami...
interessant cette tension entre ce vieil homme riche et toi a un passage difficile de ta vie je vois tres bien de quoi il retournait il y en a plein a paris français ou etrangers ki aiment se pavaner avec leur argent mais comme toi je ne leur doit rien et c tres bien ! :) bn wd bizous
RépondreSupprimerhistoire palpitante
RépondreSupprimerj'ai connu plusieurs cas d'ivrognerie
mais pas à ce point
en délirium tremens
l'homme voit des araignées au plafond
*La misère menant a tout
cette fille....désespérée aurait pu.....
je ne sais, j'imagine !
à quoi sert la richesse, le pouvoir si c'est pour se détruire et détruire l'entourage, elle a mis du temps à réagir mais a réagi !!
RépondreSupprimerbon week end
un drôle de bonhomme qui a mon avis, devait avoir si peur de la mort qu'il a brûlé sa vie .... et voulait brûler celle des autres .. heureusement que cette dame a réagi .... à bientôt mon amie, je m'envole dans quelques heures vers un pays soleil nature .. j'ai mis un article sur mon blog ... prends soin de toi et à bientôt - bisous
RépondreSupprimermerci de l'avoir partagé avec nous
RépondreSupprimerExcellente fin de journée
bon weekend
Bisous créoles
Bonsoir chère Eléna je viens te souhaiter une bonne fin de semaine gros bisous
RépondreSupprimerL'inconscience des riches...
RépondreSupprimerHeureusement ton ange gardien veillait !
Bonne journée Elena
bisous, Emma
bon week end, Elena;
RépondreSupprimerBonjour Elena,
RépondreSupprimerUn petit passage pour te souhaiter un bon week-end,
Bisous
Prima
passe un bon we bisous
RépondreSupprimersalut
RépondreSupprimerc'est pas bien de faire ce qu'à fait Simon
bonne journée