#LaFleurDuMois
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Elle savait que sa mère n’allait plus vivre bien longtemps, le cancer
la rongeait, les médecins ne pouvaient plus rien pour elle ; ils la
maintenaient en vie. Céline et son compagnon avaient décidé de se marier
surtout pour la mère de Céline, elle voulait tant voir son premier petit
enfant !
Céline était enceinte, elle espérait que sa mère pourra tenir encore un
peu pour voir son premier petit enfant.
Pour son mariage ils avaient organisé une fête dans une salle près de
la mairie, sa mère ne pouvait pas marcher, son mari la soutenait mais elle
voulait assister à la noce.
Le mariage à l’église fut prévu pour plus tard, il fallait que sa mère
puisse récupérer un peu, ils se mariaient à l’église pour elle car ni l’un ni
l’autre n’étaient vraiment croyants.
Céline souriait, elle savait que sa mère ne la quittait pas des yeux,
elle ne voulait pas non plus décevoir son père qui avait déjà tellement de mal
avec son épouse, il n’était plus qu’une ombre. Elle sentit un pincement en les
voyant sur le premier banc, elle savait garder son sang-froid, il le fallait
car toutes les têtes étaient bien tristes, ses oncles avaient déjà des têtes
d’enterrement, ils oubliaient qu’ils étaient à son mariage et non à
l’enterrement de leur sœur. Le reste de la famille n’était pas bien gai non
plus, heureusement qu’elle avait ses amis, elle les regarda et se sentit
soutenue par eux !
Après la mairie, tout le monde se retrouva dans la salle, Céline
voulait tellement oublier que sa mère était finie, il n’y avait plus d’espoir,
mais elle ne pouvait pas. Elle essaya de sourire, peu d’invités ne
connaissaient pas sa mère, les autres adoraient sa mère et son proche départ,
sa dégradation physique les touchaient plus que le mariage de Céline.
Elle regarda du côté de sa mère, elle essayait de lui sourire, ce
n’était qu’un rictus fatigué. Elle luttait depuis si longtemps et elle en avait
assez mais elle lutterait encore pour voir son petit-fils ou petite-fille.
La soirée ne se prolongea pas, les parents partirent assez tôt, les
invités de la famille suivirent et Céline n’avait plus aucune envie de
continuer de faire semblant. Sans sa mère elle aurait continué à vivre avec son
compagnon, elle ne se serait pas mariée et l’enfant serait né quand même. Le
pire sera bientôt l’église, elle le faisait aussi pour sa mère, elle n’en avait
aucune envie, elle se disait « Cela n’a pas d’importance »
Le jour du mariage à l’église arriva, Céline était belle avec sa robe
blanche, elle vit ses oncles porter sa mère, son père était à son bras, il
était blême. Elle ne savait pas s’il était blême pour elle ou pour son épouse
qu’il adorait ? Elle ne voulait pas se poser de questions, ce n’était pas
le moment. Elle devait se souvenir de ce qu’elle devait faire, se concentrer.
Tout se déroula normalement, il n’y a pas eu de bévue, son amie Valérie lui
faisait des signes discrets quand elle ne savait pas.
Elle dit « oui » Après le baiser, tout le monde sortit pour
la fameuse photo. Céline voyait que sa mère avait du mal à rester debout, même
soutenue, elle demanda à ce qu’on commence à les photographier ensemble, ainsi
sa mère put aller s’asseoir dans la voiture pendant la séance de photos.
Céline fut heureuse quand tout fut fini, elle était contente de rentrer
chez elle avec son mari, elle ne voulait plus penser au mariage ni à ses
parents ni au chagrin ; elle voulait pouvoir penser un peu à eux deux, à
leur avenir. Elle devait rester sereine, son
bébé grandissait dans son ventre, le stress n’était pas bon pour lui,
comment lui faire comprendre qu’il allait naître quand sa grand-mère allait
mourir ?
Elle se rappela du mariage de sa sœur, il y a 3 ans, sa mère riait,
elle était gaie, les gens autour étaient gais et sa sœur resplendissait,
aujourd’hui elle sourit à peine et l’évita presque. A l’époque le charme de sa
mère faisait des ravages, aujourd’hui elle était si légère que c’était
impressionnant.
Céline se souvint que sa mère mit son enfant au monde alors qu’elle
venait de perdre la sienne une semaine avant, elle espérait que ça ne se
reproduirait pas pour elle. Pourtant elle prenait le même chemin, Céline alla
se blottir dans les bras de son mari, elle avait besoin de sa tendresse. Il lui
dit :
-
La vie et la
mort sont liés, c’est naturel, pense à notre bébé ;
-
Je crois qu’il
va bientôt bouger dit-elle.
Elena
LA MARCHE
Il marchait sans se retourner, regardant droit devant lui.
Cela faisait trois heures qu’il marchait, la fatigue commençait à le tenailler,
pourtant il ne marchait pas vite !
Simon avait toujours marché du ruisseau à sa maison, au moins trois
fois par semaine ; il y avait environ dix kilomètres. Dans sa jeunesse la
promenade ne durait pas si longtemps mais avec le temps…
Il venait d’avoir quatre-vingt-dix ans, il devenait plus lent dans ses
mouvements mais personne ne l’aurait empêché de faire cette promenade. Il était
presque arrivé et ses petits-enfants l’attendaient pour l’accueillir ! Ce
soir ils lui fêteraient son anniversaire et ils seraient une trentaine.
-
Bravo Papy dit
sa petite-fille Annette !
-
Ce n’est rien,
question d’habitude fanfaronna-t-il !
La femme de Simon ne marchait plus, elle le regarda avec un air de
reproche, le médecin avait conseillé d’aller moins loin, son cœur se fatiguait.
Le vieux têtu n’écoutait jamais les médecins, il n’y avait rien à faire à part
l’attacher !
Simon se reposa un peu en discutant avec ses petits-enfants :
-
Alors ton fils
va se marier bientôt Denis ?
-
Oui papy,
j’espère bien que tu viendras !
-
Pour sûr, je ne
vais pas rater ça !
Les arrière-petits-enfants l’entouraient, il avait toujours des bonbons
pour eux. Il était aimé de la famille et se sentait heureux quand tous venaient
à la maison.
La soirée se passa merveilleusement bien. Simon souffla les bougies
avec l’aide des enfants, il reçut comme cadeau un bon pour une semaine en
Tunisie avec sa femme. Il était heureux, il n’avait pas eu l’occasion de
voyager beaucoup et ce voyage l’avait toujours tenté.
Après le repas, les invités se dispersèrent d’autres couchèrent dans la
maison.
Le lendemain matin Marianne trouva son mari mort, il avait un sourire
aux lèvres.
Elena
DEDOUBLEMENT
Elle se savait différente des autres enfants, elle jouait un double rôle
et cela ne lui plaisait pas toujours mais comment faire autrement ?
A onze ans, Katia était une grande fille blonde, le midi elle s'achetait
à manger, son père ne rentrait que le soir. Le repas expédié, Katia préfère
jouer avec ses copains, elle n'a pas d'amies, les copains lui suffisent.
Ensemble ils font du patin à roulettes, de la trottinette, ils jouent aux
billes ou aux petites voitures et Katia se sent heureuse avec eux. Il y a une
balançoire dans la courette et ils en font à tour de rôle.
Le soir son père rentre du travail et Katia redevient une fille bien
élevée, elle ne dit plus de gros mots, elle s'intéresse à Tchékhov, Pouchkine
mais aussi Maupassant ou Victor Hugo en passant par les BD. Elle a l'impression
de vivre comme au temps où son père était jeune et riche; malgré elle.
Elle se conduit de la même façon , elle prend les manières des fillettes du
début du XXe siècle, tout l'intéresse sur cette époque qu'elle n'a pas connu,
elle oublie ses copains, le reste du monde, elle vit avec son père, les
souvenirs de son père, les livres et le passé.
Si Katia a beaucoup de connaissances en russe, ses notes à l'école
laissent à désirer. Son institutrice ne l'aime pas, elle ne la comprend pas, la
trouve fière et se venge comme elle peut. Après plusieurs vexations, Katia se
renferme et finit par ne plus jouer en récréation, elle attend la sonnette pour
aller jouer avec les garçons de la rue, tous ont des problèmes mais ils l'ont
accepté, avec eux ,elle est bien.
Son père ne comprend pas pourquoi cette année les notes ont tant baissé,
il lui dit " pourquoi tu ne me demandes pas de t'aider, l'an dernier tu
travaillais bien pourtant ?" Oui, pense Katia, mais l'an dernier
elle était dans une école privée et la maîtresse l'aimait bien c'était l'amie
de grand-mère, depuis on a déménagé dans ce sous-sol, et j'ai changé d'école.
La mort de grand-mère a tout changé, maman ne sait pas aider, elle ne peut
rien dire, et Katia baisse la tête respectueusement, elle aime trop son
père pour le blesser.
Jeudi matin, Katia se lève plus tard, elle court dans la cuisine, son
père lui laisse une illustration comique avec des vers l'accompagnant, c'est le
meilleur moment de la journée, puis elle se prépare et court jouer avec ses
copains, elle essaie de trouver une heure pour ses devoirs, elle a promis et
une promesse doit être tenue.
Dehors, Katia voit un couple se disputant, l'homme rejette une femme qui
se raccroche, un cri et la femme tombe, l'homme la laisse à terre et continue
son chemin. Elle regarde discrètement si la femme a besoin d'aide, elle se
relève et repart de l'autre côté en pleurant. Cet incident frappe la fillette,
elle ne répond pas aux copains qui l'appellent et s'enferme chez elle. "Je
jure que jamais cela ne m'arrivera" dit-elle pour conjurer le sort, elle
prend un livre de Pouchkine et se laisse bercer par la fille du capitaine, elle
se sent bien, son père la trouve ainsi, il lui sourit et la vie redevient
normale, presque belle.
Ce soir-là M et ses 2 filles devaient venir à la maison, Katia les
admiraient, elles étaient bien habillées, pas comme elle, étudiaient bien et
son père en disait beaucoup de bien. A leur entrée elle sentit le mépris des
filles, leur appartement était somptueux par rapport à leurs 2 pièces dans un
sous-sol , la gène de Katia devant les autres filles, mieux loties,
devenait paralysante. Elle leur montra ses derniers livres mais elles les
avaient déjà lus puis les soeurs parlèrent ensemble oubliant sa présence, elle
y était habituée malgré la douleur qui montait.
Après le départ son père lui fit remarquer que les fillettes étaient très
bien élevées, il était si content qu'elle ne lui dit pas qu'elle ne voulait
plus les voir chez eux.
Son père était venu en France après la révolution, officier capturé, il
s'est enfui pour rejoindre ses parents, il a fallu travailler dur pour élever
ses frères de 15 et 16 ans plus jeunes que lui. Ses diplômes n'étaient pas
reconnus, comme beaucoup de Russes il devint chauffeur taxi. De famille noble
il côtoyait l'aristocratie russe, beaucoup étaient plus jeunes et avaient
étudiés en France mais d'autres comme lui n'avaient pas beaucoup de moyens.
Tous se voyaient chez les uns ou les autres, riches ou pauvres. Katia étaient
habituées à tous les milieux et s'y adaptait assez bien tant que ce n'était pas
chez elle. Elle ne savait pas ce qui la gênait le plus, ne pas avoir de mère
comme les autres, elle ne l'avait pas élevée, l'appartement insalubre, ou leur
pauvreté ? Ses sentiments lui faisaient honte, elle ne se sentait pas comme les
autres pas plus parmi ses copains, ignorants tout de ses origines que parmi la
famille ou amis de la même origine vivant autrement, le tout en fit une
fillette solitaire plongée dans les livres, ne mangeant plus le midi.
Ainsi la médecine scolaire décerna une anomalie, après des examens, Katia
apprit qu' elle avait un voile aux poumons et partirait au préventorium. Son
père lui parla d'un mois ou deux mais ça dura un an.
Au retour Katia se sentit beaucoup plus française, elle n'éprouva plus le
besoin de revoir ses anciens copains et fut presque contente de partir en
pension.
Elle resta longtemps assise entre deux chaises, le jour où Katia alla en
Russie, on fêta la Parisienne, et là elle comprit à quel point elle se sentait
française.
Elena 2024
CHEMIN PRIVE
C’était le seul chemin qui ne grimpait pas et, Maryse le prenait tous
les matins pour se tenir en forme, elle avait 80 ans passé.
Un matin en allant vers son chemin elle voit un camion au milieu du
chemin, elle s’approche, un homme lui demande ce qu’elle fait là :
-
Je me promène
sur ce chemin depuis plus de 60 ans,
-
Maintenant il
faudra chercher ailleurs car il va être privé !
-
Mais pourquoi
donc ?
-
Nous
construisons une maison et tout cet endroit sera privé.
-
Je peux passer
devant la maison tout de même.
-
Non, je crains
que les nouveaux propriétaires n’aiment pas.
Maryse alla voir ses voisins et leur raconta pour le chemin. La plupart
étaient au courant et assez remonté contre ce fait, il n’y avait pas de
solution.
Depuis Maryse se promène entre les vingt maisons de la commune sans
mettre les pieds sur le chemin privé mais le cœur est gros, elle ne voit plus
la nature et les autres chemins montent de trop pour elle. Un jour elle ne
sortit plus en dehors de sa cour et ce fut le début de sa fin. Le chemin
continua à vivre sans se poser de questions !
Elena
CABOURG
Avec mon fils nous sommes allés à Cabourg quelques jours,
c’est une charmante ville avec des énormes plages et vue sur la mer à
l’infini !
Nous avons fait le bord de la mer de droite à gauche et aussi
bronzette sur la terrasse de ma chambre d’hôtel qui donnait sur la mer. Nous
avons eu un superbe coucher du soleil !
J’ai aimé les maisons normandes et je mets quelques photos de
notre séjour.
Elena 2024
Le Parisien et sa femme invitèrent
leur hôtesse vivant à la
campagne. A la fin de la semaine il lui demanda :
-
Alors que
pensez-vous de Paris, vous en avez vu des choses !
-
Trop de choses,
trop de gens stressés, trop de bruit…
-
C’est tout ce
que vous avez retenu de Paris ? Et la Joconde ?
-
Bof, on la voit
aussi bien sur internet et de plus près et je ne fais pas la queue durant deux
heures ;
-
Et les
rues ?
-
Il faut tout le
temps surveiller son sac, l’air est irrespirable et les gens à peine aimables.
-
Vous n’avez donc
pas aimé la capitale !
-
Il faut la voir
une fois, mais je suis heureuse de retrouver mes fleurs et le chant des oiseaux
demain dit-elle en riant !
-
Je crois que
l’on ne devrait pas partir en vacances, nous ne serions pas déçu conclut le
citadin !
-
Je suis du même
avis renchérit la villageoise et ils sourirent tous les deux.
Ce qu’elle ne savait pas c’est que le
parisien revenait toujours avec joie à Paris et ne pouvait rester plus d’un
mois à la campagne mais il ne dit rien pour ne pas la vexer !
Elena