Depuis
deux ans je vis sur l’île, si seulement je savais où elle se situe ? Je ne
vois pas de bateaux, et les rares avions ne me voient pas.
Michel
est parti, il m’a laissé seule. Il cherche comment revenir à la civilisation,
je doute qu’il trouve le moyen de fuir cette maudite île, à moins de construire
une barque… Mais avec quoi ? L’île est déserte même pas un
arbre !
Je
cherche des yeux les oiseaux, ils sont tous partis, émigration du début
de l’hiver. Les quelques baies existantes ne donnent plus de fruits,
heureusement qu’il reste la pêche, pas facile de ramener des poissons à la
main, la mer devient froide, il faut avoir très faim pour s’y mettre encore.
Ensuite il faut vite s’habiller, nous n’avons pas de chauffage.
Il
serait plus simple d’énumérer ce qu’il nous reste : quelques citernes
d’eau, un paquet de sucre, un petit pot de nescafé et notre cabane, nous ne
l’avons pas détruit pour chauffer, elle nous protégera plus longtemps qu’un feu
de bois.
Nous
n’avons aucun meuble, si un lit en fer, aucun moyen de communiquer avec les
autres… Pourquoi suis-je ici ?
Je
me revois, avant notre départ, Michel m’avait poussé à accepter ce jeu, il
disait
-
tu verras nous vivons en couple depuis 4 ans, aucun nuage entre nous,
il est normal qu’on gagne. Il suffira d’être patients. Comme il se trompait, je
l’ai cru, je l’ai suivi.
La
chaîne 9A (Radio planétaire, dépendante de la télé) proposait un jeu, il
suffisait de partir sur une île inconnue, nous ne devions pas connaître la
destination, et là nous devions y rester 3 ou 4 mois maximum, le dernier
gagnant était resté 4 mois et 10 jours . Les organisateurs nous laissaient une
cabane, quelques provisions, pour un mois environ, de l’eau en assez
grande quantité , ensuite à nous de nous débrouiller. Ce jeu était destiné aux
couples mariés ou pas, le couple le plus résistant gagnait une somme
rocambolesque, elle nous permettrait d’avoir notre maison, faire un voyage et
vivre un an sans travailler.
Nous
sommes partis une vingtaine de couples, chacun de nous étaient dispatchés sur
des îles différentes. La règle nous interdisait aucun objet pour se repérer.
Nous avions avec nous un sac contenant des vêtements, le nécessaire de toilette
sauf ciseaux ou rasoir (pas d’objets coupants), nous n’avions pas de montres,
bref juste quelques livres. Il était impossible de savoir où nous
allions, chaque couple était dans une cabine séparée, impossible de se parler,
il faisait nuit, des volets fermaient les hublots, les verrous empêchaient
l’ouverture.
Michel
avait compté dix jours de traversée et moi neuf, première petite divergence.
Quand
le bateau s’arrêta pour la quinzième fois, une personne entra et nous fit
descendre. Nous nous sommes retrouvés sur un île grande de quelques kilomètres
à vue d’œil. La personne nous montra le cabanon, sans un mot elle
repartit sur le bateau, j’essayai de poser quelques questions en vain.
Michel me tira gentiment en me montrant la vue splendide sur les fleurs
sauvages, les baies, les rochers. Il s’en dégageait un côté sauvage et
pittoresque. Nous étions frappés, il n’y avait pas d’arbres, juste des
buissons, cela donnait du charme à notre île. Dans le cabanon nous trouvions de
quoi manger pour un mois et plus d’après nos estimations, une boîte
d’allumettes, ensuite il fallait apprendre à faire du feu ... L’eau ne manquait
pas et cela nous a tout de suite rassuré – Nous pourrons vivre d’amour et d’eau
fraîche dit Michel.
Dans
un coin il y avait un lit en fer et à côté une boîte bizarre, je la tournai
dans tous les sens –Lâche-là me lança Michel en colère, je la laissai tomber –
C’est un désastre cria Michel affolé. Je le regardai sans comprendre ?
-
C’est la boîte qui nous permettait de les rappeler pour revenir, comment
fera-t-on maintenant dit-il – Il y a bien un autre moyen pour les joindre
demandais-je ?- Non, justement pas, il réfléchit– Ils nous ont parlé de
cette boîte, ils avaient dit qu’ensuite le seul moyen de revenir serait d’être
très malade, ils avaient un appareil qui permettait de savoir à distance si l’un
de nous devenait très malade. Je me tais le cœur gros. Par ma faute notre
arrivée a très mal débuté.
Une
fois installé, tâche très simple avec un grand sac en toile, nous faisons le
tour du propriétaire. Je remarque qu’il y a surtout des pierres et quelques vipères,
le manque d’arbres m’inquiète un peu, je n’en parle pas à Michel, j’avais
déjà fait assez de bêtises. Les fleurs étaient vraiment splendides, je
regrettai l’interdiction de prendre sa caméra ni appareil photo. Les
framboisiers étaient les bienvenus, au moins nous ne risquions pas le scorbut,
d’autres baies se trouvaient sur l’île.
-Viens
nager me cria Michel en se déshabillant. Je courus dans l’eau et nageait avec
un immense plaisir – Regarde les poissons Michel, tu pourras pêcher
dis-je en riant.
Après
notre bain, nous avions fait l’amour, nous recommencions notre lune de miel.
Le
lendemain, nous avons commencé à nous exercer à faire du feu avec deux pierres,
au bout de deux jours Michel avait réussi à faire des étincelles, le manque
d’arbres nous empêchait d’avoir des branches, nous pouvions juste allumer les
quelques buissons séchés au soleil puis gardés dans le cabanon comme provision.
Le
manque de bois fut notre premier gros souci, d’autres suivirent…
Les
pluies commencèrent, nous n’avions rien pour chauffer, il ne faisait pas froid,
se promener toujours mouillés nous rendait de moins bonne humeur. Michel
s’exerça à la pêche, nous n’avions ni fil ni appât, il fallait attraper les
poissons à la main, cela demandait une très forte adresse de sa part. Pendant
ce temps, je cueillais les fruits, les plantes et herbes qui nous servaient de
salade, nous les mastiquions longuement. L’idée venait de Michel, comme nous
n’avions aucun moyen de partir sauf si on décelait une maladie conséquente par
ordinateur, il fallait tester les herbes, en s’empoisonnant on tomberait malade
et les secours viendraient nous chercher.
C’est
ainsi que Michel s’intoxiqua deux fois avec certaines plantes, il resta malade
un temps assez long, je ne le quittai pas, il vomissait, je pense qu’il avait
une forte température puis il se remit de lui-même. A partir de ce jour notre
inquiétude augmenta. Fallait-il mourir pour qu’on vienne nous chercher ?
Nous
comptions, les jours, mois puis années avec les pierres, il n’en manquait pas
sur l’île de la mort, comme nous l’avions appelé au bout de quelques mois.
Pendant les essais de Michel avec les plantes toxiques, ne sachant pas pêcher,
j’appris à taper sur les serpents pour les tuer , cuire et les manger. Je me
munissais de pierres et je les lançais sur le serpent, ensuite j’en prenais une
plus grosse et je l’achevais. Nous avions de la viande pour quelques jours,
c’était mieux que rien. Michel avait ramené des rats ou autres bêtes du même
genre. Les ennuis commencèrent vraiment au début de l’hiver, les fruits ne
poussaient plus, les plantes mangeables non plus ; il nous restait la
pêche, la chasse aux rats ou vipères.
Nous
avions commencé à nous tourmenter sérieusement sur notre avenir, les disputes
aussi faisaient partie de notre quotidien :
-
Comment veux-tu construire un bateau sans bois disait Michel –
Faisons un feu ripostais-je, on nous verra d’un avion – Gourde, Robinson Crusoé
c’est un roman pas la réalité rétorquait Michel. Je me retenais pour ne pas
pleurer, je ne voyais pas comment on allait s’en sortir.
Nous
avons tenu deux ans, j’ignore combien je pèse mais sûrement 1/3 de moins qu’en
venant, idem pour mon compagnon. Que pouvait-il faire ? Il y a dix jours
notre dispute fut plus forte que les autres et il partit en disant – Je
m’enfuirai, tu verras, peut-être sans toi… Puis je n’ai plus eu de nouvelles,
j’ai fait toute l’île dans tous les sens en l’appelant sans résultats.
Déjà deux ans et 10 jours, il y a de quoi être inquiète ,
seule c’est devenu intenable. La fatigue, le froid et la faim m’empêchent
de réfléchir clairement.
J’entend
un avion, le premier depuis des mois, je regarde stupéfaite, il s’approche et
va se poser sur l’île. Avec mes dernières forces je cours vers lui. Une équipe
de secours descend en me demandant – Où se trouve le malade ? Ahurie je ne
répond pas, un déclic et je crie – Michel, c’est sûrement lui, je ne l’ai pas
trouvé, j’ignore où il est.
L’équipe
part d’un pas vif et je la suis avec mes dernières forces. Nous le trouvons
entre deux pierres évanoui.
Une
heure plus tard nous montons dans l’avion, Michel avait repris des couleurs, il
me sourit – Je l’ai fait exprès, tu sais les plantes qui m’ont rendu malade,
j’en ai repris et tu vois ça marche chuchote-t-il. Fatigué il s’endort appuyé
contre moi.
En
avion le trajet me paraît assez court, personne ne nous dit où était
située l’île d’où nous venons. Ils acceptent uniquement de nous nourrir ,
donner à boire, surveiller le pouls de Michel.
Au
retour, nous nous sommes retrouvés dans la même salle qu’au départ, la
direction de la chaîne nous félicita, donna le chèque, et nous renvoya chez
nous après des vagues félicitations. Une personne héla un taxi pour nous, et
maintenant il fallait qu’on se débrouille. Michel est trop fatigué et je le laisse
se remettre, je réfléchis à ce qui vient de se passer – Pourquoi ils n’ont rien
répondu, ignorant mes questions ? Ils ne voulaient pas notre mort me
demandais-je un peu effrayée.
Premier
but, nous soigner, après comprendre ce qui s’est passé.
Le
médecin vient de partir, je commence à me sentir un peu mieux, Michel revient
aussi à la surface, il peut parler plus longtemps. Il m’explique qu’il a fait
exprès de se fâcher pour pouvoir exécuter son plan, il savait que je ne le
laisserai pas faire.
Maintenant
que fait-on ? Pense-t-il tout haut – Je crois qu’il faut revoir les
organisateurs du jeu , ils doivent savoir pourquoi personne ne s’est
inquiété de nous durant si longtemps dis-je- Mes parents font le tour du monde,
ils n’ont pas pensé qu’on risquait quoi que ce soit et les tiens … Je me tus,
ils étaient fâchés depuis plus de trois ans. Oui… fit Michel il faut essayer
d’éclaircir les choses, trop de ténèbres dans cette affaire.
La
chaîne 9A n’était pas au courant de notre départ depuis 2ans, la robotique
s’occupe de tout, dès qu’un couple veut revenir il suffit d’appuyer sur le
bouton de la boîte et nous sommes prévenus, vous avez cassé la boîte, il était
impossible de venir vous chercher dit la responsable – Pas possible que
personne ne se soit aperçu de notre longue absence ? rétorque Michel –
Vous êtes des milliers à suivre différents jeux, nous ne pouvons pas surveiller
chacun de vous, l’ordinateur s’occupe de tout, nous ne sommes que cinq
personnes pour tout organiser finit par dire la responsable, comment
voulez-vous qu’on voit tout ? J’explose – Alors, on ne fait pas de jeux
aussi dangereux si on ne peut pas assumer les imprévus criais-je ! Elle
hausse les épaules et quitta la salle.
Michel
me prend le bras et m’emmène à la maison, il téléphone à son avocat, un
ami d’enfance, celui-ci lui répond qu’il ne gagnerait pas le procès contre la
production, il le lui déconseille fort d’autant plus qu’on a touché une belle
somme en tant que gagnants.
Tu
te souviens nos parents disaient, dans les années 2008 "ces jeux dans les
îles finiront mal", nous ne les avons pas cru fit Michel – Tu as raison,
les miens prédisaient qu’il y aurait obligatoirement des accidents sans la
surveillance de l’homme sur la robotique, dire que nous avons perdu deux ans et
personne ne nous les rendra même pas l’argent qu’ils nous ont donné, ces deux
ans de notre jeunesse pourrons-nous les retrouver dis-je en soupirant ?
Michel
haussa les épaules et m’embrassa tendrement, il n’avait pas la réponse. Il
fallait réapprendre à vivre dans un monde déshumanisé.
Elena
coucou
RépondreSupprimerje tiens à t'informer que je change de plateforme
je n'aime pas la nouvelle version d'OB
voici ma nouvelle adresse
http://sonya972.eklablog.fr/
gros bisous
tu as fait fort chere Ln, la " Téléréalité " dans toute sa splendeur, deux ans pour ça !! bravo bien conçu ton suspense, bonne journee bisous
RépondreSupprimerUn p'tit coucou en passant gros bisous bonne journée
RépondreSupprimerun savant melange de kohlanta et l ile de la tentation c tres interessant je reponds aux coms bien que je sois en pause vacances" merci de ta visite bne journee bizous
RépondreSupprimerbin avec certaines télé réalité dont j'entends parlé on est pas loin ..... bon ensuite moi j'ai pas la télé donc j'entends juste aux infos les choses qui dérapent ....j'ai jamais vu un seul de ces jeux , je peux donc pas jugé .... mais ton texte est prenant
RépondreSupprimerici le ciel est bien noir , cette nuit une mini tempéte , il y a méme eu pas mal de dégats dans une ville voisine ... un stade de foot ravagé par une mini tornade ....si gros orage je coupe l'ordi ...ici pas de prise de terre alors vaut mieux tout couper :)
bisous
les tarifs sont adaptés au niveau de vie des gens dans cette région de l'Inde;
RépondreSupprimerbelle journée, Elena
salut
RépondreSupprimertu crois que cela peut arriver dans la réalité
Ah oui on est dans le futur
bonne journée
j'étais en train de répondre longuement et tout tout
RépondreSupprimervoila-t-y-po que edf s'est fermé, la plume en l'air
donc je te dirais un peu plus une autre fois
pasque j'ai oublié
ne vas plus comme ço ds des i^les dézertes
c'est dangereux
guy qui a dévoré ton récit
on s'y croyait
le bonhomme était-il digne de toy ?
Et le pougnon gagné à la sueur de ton front, tu l'as investi sur le livret A , c'est pas rentable !
Un monde vierge est-il déshumanisé pour autant. Dans la mesure où un être humain y réside il devient "humanisé". En revanche belle parabole de la téléréalité-à-la-con que l'on nous sert tous les jours...
RépondreSupprimerJe suis toujours admirative par tes écrits. Tu vas d'un univers à l'autre avec toujours autant de talent.
RépondreSupprimerMa petite Gazelle serait allée vous voir sans problème et elle aurait accepté les caresses - elle était tellement câline. Bisous
Un peu légers les organisateurs de ce jeu futuriste ! Mais ce n'est qu'une histoire, naturellement.
RépondreSupprimercoucou elena .... vois-tu, je sais que ce n'est qu'une fiction et pourtant, j'ai comme encore un frisson en relisant cette hiwstoire que tu avais déjà publiée .... je me dis que vu les bêtises qui passent ou sont passées à la TV un de ces 4 quelque "taré" de l'audiovisuel serait bien capable de créer un tel jeu et des gens assez crédules pour y participer ....
RépondreSupprimerbonne soirée et gros bisous
il y a des émissions qui peuvent détruire une vie
RépondreSupprimerJe te souhaite une excellente soirée
Ti bo